Aux jeunes du train

Dans le train nous menant vers Auschwitz vous m'avez demandé: "Pourquoi accompagnez-vous ce train pour la 3ème fois?" et il y avait dans votre question un étonnement, une surprise.

Avant le départ, chacun des dix groupes que vous étiez avaient préparé un calicot sur lesquels vous aviez écrit au centre, en large lettre hébraïque ZAKHOR "souviens-toi" et tout autour de ce mot-racine comme en écho, dans toutes les langues possibles, ses traductions. Premier message de ce voyage: le peuple juif, peuple de la Bible, peuple de Jésus nous transmet comme un impératif le devoir de mémoire: Souviens-toi, nous laissant le soin de la répéter à tous les peuples. Pourquoi j'ai accompagné ce train pour la troisième fois? Parce que j'ai besoin de me souvenir moi aussi. Car le souvenir n'est pas figé en moi - mais il vit en moi, avec moi, il s'approfondit, se creuse, me transforme, me questionne à nouveau sur ma vie d'aujourd'hui. Parce ce que la "mémoire" de ces choses ne s'efface pas, il me faut régulièrement faire une "mise à jour" et cette "mise à jour" je ne peux mieux la faire qu'en votre compagnie - vous les jeunes d'aujourd'hui.

Avec vous j'ai pu mesurer, un peu, comment la transmission de l'histoire si affreusement tragique des camps de la mort pouvait vous atteindre aujourd'hui. Et vous avez répondu à mon attente, vous avez su dire votre émotion, formuler vos questions avec clarté, prendre vos décisions pour l'avenir et aussi dire votre espérance - "Nous ne sommes plus les mêmes" ont dit plusieurs d'entre vous au retour. J'ai dit cela, moi aussi, à chaque retour. Et parce que nous ne sommes plus les mêmes, le monde, n'est plus le même, lui non plus. Voilà notre espérance. Nous retournerons à Auschwitz et nous nous SOUVIENDRONS. Merci à chacun de vous.

 Sœur Louise-Marie