Les fortifications allemandes

Si le front est resté stable à l'est d'Arras, ce n'est pas le cas au nord où ont lieu de sanglantes batailles, notamment autour de Notre Dame de Lorette et de Vimy. Aucun côté n'a encore trouvé la méthode pour rompre le front, malgré l'utilisation du gaz et un renfort en artillerie, qui prépare chaque attaque par des journées entières de bombardement. Mais les troupes, spécialement les Allemands, renforcent les tranchées. Ils créent des blockhaus, couvrent des abris avec des mètres de terre ou de béton, creusent des lignes parallèles. Les Allemands changent de tactique: ils laissent moins de troupes dans les premières tranchées, soumises au feu de l'artillerie, et amassent plutôt des réserves à l'abri de l'ennemi, d'où ils pourront intervenir rapidement en cas d'attaque. Le 26 et 27 février 1917, ils se replient sur la ligne “Hindenburg”, où ils avaient construit des fortifications. Cette ligne s'étale entre Arras et l'Aisne, raccourcissant le front et permettant d'économiser des troupes. Entre les tranchées, il y a des abris bétonnés pour les mitrailleuses. Un tel abri peut être visité sur la D37E entre Tilloy-les-Mofflaines et Wancourt, à un kilomètre après le cimetière anglais de Tilloy.

 

Fortification allemande entre Tilloy et Wancourt

 

Les Britanniques à Arras

En mars 1916, l'Entente redéploie ses troupes. Ce sont les Britanniques qui reprennent le secteur d'Arras. Il existe une carte du secteur, mise à jour le 27 décembre 1916, probablement grâce aux observations de l’aviation britannique. Le village de Feuchy s’étend, sur cette carte, à peu près de l’endroit de l’actuelle mairie sur 700 mètres vers l’est. De l’ouest de la mairie jusqu’au marais, la carte indique le “Feuchy Redoubt”, un système de fossés “prêt à la défense”. Et derrière la ligne de chemin de fer commence un long fossé, fortifié lui aussi, le “Feuchy Switch”, qui relie Feuchy à la ligne principale Nord-Sud, à hauteur de St. Laurent-Blangy. Le chemin qui conduit aujourd’hui au “Houdain Lane Cemetery” doit être le “Houdain Lane” de l'époque, un boyau de communication qui va vers la Chapelle de Feuchy. La route entre Feuchy et la zone industrielle était aussi une ligne de défense fortifiée, et, dans les champs entre Feuchy et la N39, se trouvent de nombreux points sur cette carte, probablement des positions d’artillerie. Les terrassements pour le chemin de fer cachaient des abris en béton, et un boyau était creusé entre les rails.

 

Carte anglaise des tranchés autour de Feuchy - Clickez pour agrandir (762394 bytes)

extrait du "Trench Map Arras 51B NW3"

(c) G.H. Smith & Son

Position des fortifications "Feuchy Redoubt" aujourd'hui

 

La troisième bataille d'Artois

En avril 1917, la troisième bataille d'Artois déplace le front autour de Feuchy. Les Anglais ont pour objectif d'aller à Vimy, d'amener Arras hors de portée de l'artillerie allemande et d'atteindre Douai pour ensuite contrôler le bassin minier et percer plus loin. Ils ont rassemblé en grand nombre l'artillerie, les chars et les avions. Leurs troupes se sont entraînées pendant des semaines sur des terrains de manœuvre à quelques kilomètres derrière le front, dans des tranchées d’entraînement. La coordination entre l'artillerie et l'infanterie est améliorée et des plans de tir détaillés établis. À Arras, une ville souterraine héberge les troupes, des tranchées couvertes et des tunnels permettent d'amener les troupes sur les lignes sans qu'elles soient vues par l'ennemi. Pendant la journée, les rues restent vides pour cacher les troupes au regard des avions de renseignement allemands, mais la nuit, elles grouillent de monde “ comme Gallowgate le samedi soir ”. Le secteur sud, de Neuville-St. Vaast à Croisilles, est occupé par la 3e armée sous le général Allenby. Côté allemand, c'est la 6e armée. De St. Laurent vers le sud jusqu'à Croisilles, le front est tenu par le 9ème corps d'armée de réserve, appelé groupe Arras. La partie nord, dont Feuchy, se compose de la 11e division prussienne sous le commandement du Generalleutnant von Schöler. Au nord de la Scarpe est stationné le 1er corps de réserve bavarois, avec, au plus près de la Scarpe, la 14e division sous le commandement du général von Rauchenberger. La 11e et la 14e arrivent de la Somme pour se reconstituer après la bataille, dans un secteur réputé “ calme ”. D’autres unités sont arrivées quelques jours auparavant et ont à peine eu le temps de s’habituer au secteur. Dans les airs, il y a entre autres la Jagdstaffel 11, stationnée près de Douai, commandée à partir de janvier par le fameux “baron rouge”, Rittmeister Manfred von Richthofen.

 

9 avril 1917

Pendant quatre jours, l'artillerie britannique pilonne les Allemands. 28 avions britanniques et 15 allemands seront abattus. On dispose d'un canon britannique pour neuf mètres de front, 2.7 millions d'obus seront tirés au total. Dans la nuit du 8 au 9, pendant cinq heures, les Britanniques envoient du gaz. Le 9 avril vers 3 h 15, le feu s’arrête dans le secteur de St. Laurent, une dernière chance pour les Allemands de se ressourcer et d’évacuer les blessés. A 5h30 du matin est déclenchée l'action “Big Push”. Le temps est mauvais, il neige. Pendant que les Canadiens parviennent à occuper Vimy, les Britanniques percent les lignes allemandes à l'est. Les premières compagnies avancent rapidement, mais sans éliminer toutes les positions allemandes, qui continuent à se battre dans leur dos. Le “Railway triangle” au sud-ouest de Feuchy est attaqué. Ce point fortifié a une hauteur de 20 mètres et des fortifications bétonnées, la progression des premières compagnies y est stoppée. Finalement, un contact avec l’artillerie est rétabli et le feu à nouveau dirigé sur les fortifications. Elles seront prises. Parmi le butin, un canon, des montres, du pain noir, des saucisses et 1000 bouteilles d’eau minérale.

(c) Illustrated Michelin Guides to the battle-fields, G.H. Smith & Son

Avec l'aide du char Lusitania, la progression continue. Les Britanniques longent la Scarpe et occupent la deuxième ligne des tranchées entre Feuchy et Athies. Le char Lusitania se dirige vers Feuchy en longeant la voie ferrée. Le capitaine Littlewood, médecin militaire, prend ses fonctions vers 18 heures dans un poste de premier secours placé à l'abri des arches du pont de chemin de fer (1917). Il met ensuite en place une antenne médicale près de l'église, mais trouve le lieu trop facilement repérable et le déplace dans un abri allemand près de la Scarpe. Il y restera jusqu'au 12 avril.

 

Feuchy est pris par la 15th (Scottish) Division sous l'ordre du général MacCracken. Ensuite, Athies est capturée par la 9th (Scottish) Division, qui atteint aussi Fampoux.